À me faire nuit

Marc Chagall


À me faire nuit
Chanson sans musique, esquisse

Veux-tu me prendre
Tel un bandit,
Veux-tu me pendre
Au temps jeudi,
Je suis la plaine,
À me faire nuit,
Je bois la source,
Du paradis.

refrain:

À me faire nuit
À me faire nuit,
Je vois des anges,
Je suis mot-dit

Si ma douleur
Piano, blanche.
Aux cieux l’heure
Pour toutes planches,
Se passera,
Quand je saurai,
Que l’an mourir,
N’eut un jardin .

refrain:

Pour cette lieue,
Si loin, si loin,
l’endroit se peu
Au plus ou moins.
D’une façon,
qu’el' se prend belle
Pour nourrir tant,
Un sang espoir.

refrain:

Pour effacer,
Quand vient le soir.
Sa propre lune
au ciel d’ivoire.
Pour espacer
Un peu l’espoir.
De cette vie
Que je, toi-noir.

refrain:

Ne faudrait pas
Signer lenteur,
Pour l’eau de las
Et toute peur.
Mon espace et
Tous mes tourments,
À tout hasard, en si, vraiment.

Faudrait voir avec la forêt
Si les arbres ont encore
Toutes Leurs racines.

refrain:

Et je me songe
sans le présent,
Mon avenir
n’a plus d’endroit,
Et mon passé
est fait de pierre.

De tout ce mort
qui me rappelle,
Ce que je perds,
Maintenant.

Veux-tu me prendre,
Tel un bandit,
Veux-tu me pendre,
Au temps jeudi.

refrain:

N’ayant plus mer,
pour jaser
N’ayant plus pairs,
pour aimer.
Et toute sœur,
qui fut brûlée,

Et ce fils, qui me manque.

Je vois des ans-vers, menaçants,
Tel un convoi, au fil du temps,
Qu’il est père-vert, ce temps méchant.

Veux-tu me prendre
Tel un bandit
Veux-tu me pendre
Au temps jeudi.

refrain:

Je saurai conduire
mon néant,
Com' si la terre
était, la belle.
Avec les gens
qui sont dedans
Avec les gens…

qui m’aiment tant.

À me faire nuit
À me faire nuit,
Je vois des anges
Ils sont ici.

Et pour tous ceux,
que j’aime tant,

un écrit lent, sous une histoire,
qui se renomme, avant la fin.

À me faire nuit
À me faire nuit,

Je vois des anges,

Et je l’écris.

atouthasard